Merci à Sarah Dirren, animatrice reporter, de l’émission CQFD de la Radio Télévision Suisse, d’avoir invité notre président André Dunand le 23 octobre 2024. L’invitation fait suite à notre communiqué de presse « Ce n’est plus un mythe : Plus de 350 sites d’abeilles mellifères sauvages déjà identifiés en Suisse ».
LIEN VERS L’INTERVIEW
Le projet Swiss BeeMapping de FreeTheBees a enregistré cette année la 350e colonie d’abeilles mellifères sauvages au nord des Alpes. En raison des intérêts divergents des défenseurs des animaux et des producteurs de miel, l’existence et le besoin de protection de cette espèce sauvage font l’objet d’un débat intense depuis des années. Les derniers résultats de recherche ouvrent de nouvelles perspectives pour des initiatives conjointes visant à préserver les abeilles mellifères sauvages – avec des avantages pour notre écosystème et l’agriculture.
Un travail de pionnier grâce à la science citoyenne fait progresser la recherche sur les abeilles
Avec le 350e signalement par des citoyens scientifiques bénévoles au printemps 2024, le 100e signalement dans le canton de Zurich et le 50e dans le canton de Berne ont également été enregistrés. « Ces chiffres représentent une percée dans la recherche sur les abeilles mellifères sauvages en Suisse », déclare André Wermelinger, directeur de FreeTheBees et co-initiateur de Swiss BeeMapping. « Jusqu’à présent, la présence de cette espèce indigène en Suisse n’avait jamais été étudiée de manière systématique. »
L’abeille mellifère sauvage existe – mais pour combien de temps encore ?
Les données les plus récentes contredisent l’opinion répandue selon laquelle il n’y aurait pas d’abeilles mellifères sauvages en Suisse. Néanmoins, ces importants pollinisateurs sont confrontés à de grands défis :
- Manque d’habitat : Il manque des cavités d’arbres appropriées dans lesquelles les abeilles nichent naturellement.
- Offre alimentaire insuffisante : En raison du manque de diversité alimentaire et de l’impossibilité de constituer des réserves en été, de nombreuses colonies d’abeilles meurent de faim en hiver.
- Parasites et maladies : L’acarien Varroa et d’autres ennemis, comme le frelon asiatique récemment introduit par la mondialisation, affaiblissent les colonies d’abeilles indigènes.
- Produits phytosanitaires et produits chimiques : Lors de leur travail de pollinisation, les abeilles n’ont aucune chance d’échapper au large spectre des produits chimiques industriels.
La mortalité des abeilles en Suisse et en Allemagne est particulièrement élevée
« Nos données montrent des taux de survie hivernale entre 10 et 20%, ce qui correspond aux résultats observés en Allemagne », explique Raphaèle Piaget, responsable du projet Swiss BeeMapping. Cependant, des taux de survie plus élevés seraient nécessaires pour une population stable. La recherche n’a pas encore une image claire des causes de cette forte mortalité. L’accent mis sur le varroa chez les abeilles mellifères domestiques a relégué au second plan l’étude d’autres facteurs tels que la nourriture, les sites de nidification et les toxines environnementales, ainsi que l’abeille mellifère sauvage en général. Le fait que la mortalité soit si élevée en Suisse et en Allemagne par rapport à d’autres pays européens est préoccupant. Car, là où l’abeille mellifère ne peut plus survivre par ses propres moyens, la nature est déjà dans un état précaire selon certains experts.
La controverse autour de l’abeille mellifère freine les efforts de protection
Le terme « abeille mellifère sauvage » a souvent créé de la confusion dans l’opinion publique et suscité de vifs débats dans les milieux spécialisés. En effet, l’abeille mellifère est classée à la fois comme animal de rente et comme animal sauvage. Sa reconnaissance comme abeille sauvage par l’Office fédéral de l’environnement (OFEV) en 2020, due à l’initiative de FreeTheBees, a ouvert des possibilités pour une meilleure protection. Néanmoins, le développement de mesures concrètes reste difficile : de nombreux apiculteurs craignent que les colonies sauvages ne contaminent leurs colonies d’élevage avec des maladies et des parasites, bien que des études internationales voient plutôt dans les colonies d’élevage un danger pour les abeilles mellifères sauvages et d’autres espèces.
Mais les abeilles mellifères élevées par les apiculteurs sont aussi de plus en plus sous pression pour survivre. André Wermelinger, appelle donc toutes les parties prenantes à « développer ensemble des solutions qui prennent en compte à la fois la protection des abeilles mellifères sauvages et les intérêts de l’apiculture ». La présence d’abeilles mellifères sauvages est cruciale pour la conservation de l’espèce. Une adaptation efficace des abeilles aux conditions environnementales changeantes n’est possible que si une sélection naturelle peut avoir lieu sans intervention manipulatrice de l’homme. « En agissant rapidement », déclare Wermelinger, « nous pouvons protéger l’espèce à long terme, et ainsi assurer la pollinisation de nos cultures par les abeilles mellifères, d’autres abeilles sauvages et d’autres insectes volants ».
À propos de Swiss BeeMapping : Le projet de science citoyenne Swiss BeeMapping recense et cartographie depuis 2020 les colonies d’abeilles mellifères sauvages qui ne sont ni entretenues ni manipulées par l’homme. Jusqu’à présent, plus de 130 bénévoles ont découvert et observé plus de 350 sites de nidification dans toute la Suisse. FreeTheBees pense que le nombre de cas non recensés est encore plus élevé, car les sites de nidification sont souvent difficiles à découvrir dans les zones forestières isolées et les endroits peu fréquentés.